En plein Caucase, en bord de mer Caspienne, l’Azerbaïdjan a longtemps été l’objet de conflits mais a surtout été au croisement des cultures Islamiques, Perses et Européennes. Le tapis traditionnel azéri, qui fait partie du patrimoine culturel de l’UNESCO, est le fleuron de l’artisanat du pays ; sa technique de fabrication n’a pas changé depuis des siècles.

L’artiste Faig Ahmed poursuit cette tradition tout en la confrontant au monde contemporain. Dès l’enfance il jouait sur ces tapis qu’il considérait comme des univers à part entière dont les motifs étaient un coup des arbres, des routes ou des dragons. Ces motifs et ornements sont pour lui un language que chacun peut interprété. Lui même les découpaient pour les transformer… Aujourd’hui il utilise des logiciels pour concevoir ses tapis sur ordinateur, puis il en confie les impressions à des tisserands locaux qui reprennent les techniques et les matériaux utilisés depuis 300 ans.

Pour lui, la symétrie des tapis traditionnel “apporte une stabilité. Tout le reste dans la vie est instable : la nature, la société… mais les tapis ne changent jamais, c’est pour cela que tout le monde garde un lien avec eux. J’ai choisi de travailler avec des tapis car ils symbolisent la stabilité et des principes immuables ; ce qui les rendait difficile à transformer en oeuvre contemporaine, un acte qui signifie une pensée libre.” Ses oeuvres illustrent peut-être son désir de réunifier le monde moderne avec celui de ses ancêtres. Ou alors est-ce une critique? Le pétrole étant à la fois le moteur économique du pays et l’ornement de nombreuses de ses pièces.

P.M.


Right in the Caucasus on the Caspian seaside, Azerbaijan has long been the subject of conflicts but has also been at the crossroads of the Islamic, Persian and European cultures. The traditional Azeri carpet, designated Masterpiece of intangible Heritage by UNESCO, is the jewel of the country’s craft; its manufacturing technique has not changed for centuries.

The artist Faig Ahmed continues this tradition while confronting it to the contemporary world. From childhood he played on the rug he considered as full universe whose patterns were once trees, roads or dragons. These motifs and ornaments are for him a language that everyone understands. He even cut them at that time to transform them … Today he uses software to design carpets on computers and then leaves the impression to local weavers who use 300 years old techniques and materials.

For him, the symmetry of the traditional carpet “provides stability. Everything else in life is unstable: nature, the community and society, but carpets never change, that’s why everyone relates to them.  I choose to work with carpets because they symbolize stability and unshakeable principles, so it was a challenge to make them into contemporary art, which should be about thinking freely.” His works may illustrate his desire to reunify the modern world with the one of his ancestors. Or is it critical? Oil being both the country’s economic engine and the ornament of many of his pieces.

P.M.

Dans une époque où l’image règne, Ida Tursic & Wilfried Mille sont des ogres qui collectionnent, consignent et apprivoisent ce qu’ils trouvent sur internet, dans des films où ce qui les entoure ; ils ont classé plus de 140 000 images en dix ans. Ce duo de peintres français ne se contente pas pour autant de coucher sur la toile ce qu’il capture sur le web ou autour de lui. L’image peinte est comme un organisme qui doit avoir subi les traces du temps, qui doit raconter plus que ce qu’elle montre. Un tableau peut résider dans l’atelier en suspens car “il manque […] de la profondeur, la patine du temps, il lui manque le mystère, la complexité de l’événement, il lui manque son fantôme.” Ces artistes sont des physiciens qui expérimentent ; ils raclent leur palette pour récupérer les copeaux de peinture qui auront un jour, peut-être, une seconde vie ; agrandissent des clichés au point de n’en voir plus que des détails qui transforment leur toile en abstraction. Que ce soit en représentant des images pornographiques ou de petites fleurs des champs alentours, c’est la peinture “qui finira le travail, c’est elle qui aura de toute façon le dernier mot, avec ses imprévus, ses surprises, ses contradictions qu’il faudra accepter ou refuser.

P.M.


In a time where image reigns, Ida Tursic & Wilfried Mille are ogres who collect, record and tame what they find on the Internet, in movies or in surroundings; they have classified over 140 000 images in ten years. This duo of French painters is not contenting himself with painting on the canvas what he captures on the web or around him. The painted image is like a organism that must have suffered the traces of time, that should tell more than it shows. A painting can reside outstanding in the workshop because “it lacks […] of the depth, the patina of time, it lacks the mystery and complexity of the event, it lacks its ghost.” These artists are like physicists they experiment; they scrape their palette to recover the paint chips that will one day have, perhaps, a second life; enlarge snapshots at a point that we are unable to see more than details and thus transform their canvas into abstractions. Whether depicting pornographic images of flowers from surrounding fields, it is the painting “that will eventually do the job, that will anyway have the last word, with its unexpected, surprises, contradictions that we will have to accept or to decline. “

P.M.

Les médias de masse et la pop culture influencent et inspirent les artistes depuis des décennies. L’artiste berlinois Johannes Kahrs peint sur ses toiles des photos ou des arrêts sur images de personnes exsangues, à la peau et aux traits fatigués. On y voit de l’ennui, de la tristesse, du vide ou de l’absence aussi bien dans les yeux des sujets que dans les environnements qu’il peut reproduire. Nous renvoie-t-il à la solitude représentée ou à la nôtre lorsque l’on regarde un écran ? Le peintre lui-même semble plus attaché aux pixels plus qu’à la chair : “Je n’ai pas de modèles dans mon studio, j’ai essayé plusieurs fois mais ça n’a pas fonctionné – je trouve leur présence perturbante.

P.M.


Mass media and pop culture have influenced and inspired artists for decades. The Berliner artist Johannes Kahrs paints bloodless people, tired skins and features from photos or stills. It shows boredom, sadness, emptiness or absence both in the eyes of the subjects or in environments he reproduces. Does he turn us to the loneliness represented or to our own when we are looking at a screen? The painter himself seems more attached to pixels than flesh : “I don’t have models in my studio, I tried it a couple of times but it didn’t work – I found their presence unsetting.

P.M.