L’interstia est une technique décorative particulièrement employée en Italie au XVème siècle dans les édifices religieux. L’artiste américain, et ancien charpentier, Roddy Wildeman s’est inspiré de cette technique qui est l’ancêtre de l’ébénisterie pour réaliser ses oeuvres. Au delà du savoir-faire, ces panneaux ont pris une autre dimension lorsque l’ouragan Sandy a ravagé la cote new-yorkaise en 2012. En effet ses oeuvres sont constitués de morceaux de bois provenant de maisons, pontons et mobiliers n’ayant pas résisté à la tempête. Chaque pièce de ces oeuvres, qui peuvent en contenir jusqu’à 700, est sélectionnée par l’artiste et est à peine transformée. Il regrette que les murs ne puissent pas parler car il sait que “depuis des générations, des personnes ont vécu, aimé et sont morts en présence de ces matériaux.”

P.M.


Interstia is a decorative technique mainly used in Italy in the fifteenth century for religious buildings. The American artist, and former carpenter, Roddy Wildeman was inspired by this technique, which is the ancestor of cabinet-making, to create works of art. Beyond the know-how, these panels took another dimension when Hurricane Sandy devastated the New York coast in 2012. Indeed his works are made of pieces of wood from houses, decks and furniture weathered by the storm. Each part of these works, which can contain up to 700, is selected by the artist and is barely changed. He regrets that the walls cannot talk because he knows that “For generations, people have lived, loved and died in the presence of these materials.”

P.M.

En plein Caucase, en bord de mer Caspienne, l’Azerbaïdjan a longtemps été l’objet de conflits mais a surtout été au croisement des cultures Islamiques, Perses et Européennes. Le tapis traditionnel azéri, qui fait partie du patrimoine culturel de l’UNESCO, est le fleuron de l’artisanat du pays ; sa technique de fabrication n’a pas changé depuis des siècles.

L’artiste Faig Ahmed poursuit cette tradition tout en la confrontant au monde contemporain. Dès l’enfance il jouait sur ces tapis qu’il considérait comme des univers à part entière dont les motifs étaient un coup des arbres, des routes ou des dragons. Ces motifs et ornements sont pour lui un language que chacun peut interprété. Lui même les découpaient pour les transformer… Aujourd’hui il utilise des logiciels pour concevoir ses tapis sur ordinateur, puis il en confie les impressions à des tisserands locaux qui reprennent les techniques et les matériaux utilisés depuis 300 ans.

Pour lui, la symétrie des tapis traditionnel “apporte une stabilité. Tout le reste dans la vie est instable : la nature, la société… mais les tapis ne changent jamais, c’est pour cela que tout le monde garde un lien avec eux. J’ai choisi de travailler avec des tapis car ils symbolisent la stabilité et des principes immuables ; ce qui les rendait difficile à transformer en oeuvre contemporaine, un acte qui signifie une pensée libre.” Ses oeuvres illustrent peut-être son désir de réunifier le monde moderne avec celui de ses ancêtres. Ou alors est-ce une critique? Le pétrole étant à la fois le moteur économique du pays et l’ornement de nombreuses de ses pièces.

P.M.


Right in the Caucasus on the Caspian seaside, Azerbaijan has long been the subject of conflicts but has also been at the crossroads of the Islamic, Persian and European cultures. The traditional Azeri carpet, designated Masterpiece of intangible Heritage by UNESCO, is the jewel of the country’s craft; its manufacturing technique has not changed for centuries.

The artist Faig Ahmed continues this tradition while confronting it to the contemporary world. From childhood he played on the rug he considered as full universe whose patterns were once trees, roads or dragons. These motifs and ornaments are for him a language that everyone understands. He even cut them at that time to transform them … Today he uses software to design carpets on computers and then leaves the impression to local weavers who use 300 years old techniques and materials.

For him, the symmetry of the traditional carpet “provides stability. Everything else in life is unstable: nature, the community and society, but carpets never change, that’s why everyone relates to them.  I choose to work with carpets because they symbolize stability and unshakeable principles, so it was a challenge to make them into contemporary art, which should be about thinking freely.” His works may illustrate his desire to reunify the modern world with the one of his ancestors. Or is it critical? Oil being both the country’s economic engine and the ornament of many of his pieces.

P.M.

Winter is coming mais Agata Oleksiak, dit Olek, n’a que faire des saisons. Que ce soit en plein hiver à New York ou sous la chaleur d’Hawaii pendant le festival Pow Wow, l’artiste polonaise n’arrête pas le tricot. Olek, qui vit à Brooklyn, est un ogre dont les pelotes dévorent tout sur leur passage. Particulièrement remarquée en 2010 lorsqu’elle a recouvert le fameux taureau de Wall Street sculpté par Arturo Di Modica, elle s’attache à mettre en lumière des objets ou des mobiliers du quotidien mais aussi des sculptures et des monuments historiques qui sont parfois tombés dans l’oubli, auxquels on ne fait plus attention. Elle crée ainsi un dialogue avec ces symboles ; une curiosité qui permet de rappeler la raison de leur présence. “Je pense que le crochet, et la façon dont je le crée, est une métaphore de la complexité et de l’interdépendance de notre corps et de ses systèmes et de sa psychologie. Les connexions sont plus fortes quand elle sont tissées plutôt que sous forme de liens séparés, mais, si vous coupez un fil, le tout tombera en morceaux.

P.M.


Winter is coming, but Agata Oleksiak aka Olek, has nothing to do with the seasons. Whether in winter in New York or in the heat of Hawaii during the Pow Wow festival, the Polish artist does not stop knitting. Olek, who lives in Brooklyn, is an ogre whose yarns devour everything in their path. Particularly noticed in 2010 when she covered the famous bull of Wall Street carved by Arturo Di Modica, she aims to highlight objects or furniture from everyday life but also sculptures and historical monuments that sometimes fell into oblivion, and that we do not see anymore. She creates a dialogue with these symbols; a curiosity that can recall the reason for their presence. I think crochet, the way I create it, is a metaphor for the complexity and interconnectedness of our body and its systems and psychology. The connections are stronger as one fabric as opposed to separate strands, but, if you cut one, the whole thing will fall apart.

P.M.

 

Guillermo del Toro le décrit comme un “maître du Rococo post-industriel”. Les incroyables sculptures de l’artiste américain Kris Kuksi, conçues en partie d’objets de récupération et de figurines de maquette, racontent autant d’histoires qu’il y a d’angles et de détails à observer. Elles nous plongent d’abord dans un univers morbide et rendraient fier tout pirate qui en ornerait la poupe de son navire. Il s’inspire autant de l’art gothique que de l’iconographie heavy metal – ayant passé sa jeunesse passée à reproduire les pochettes d’albums d’Iron Maiden qui, à l’époque, représentaient pour lui la plus haute forme d’art. Kuski qualifie son travail d’équilibre entre chaos et symétrie et on y trouve un caractère religieux (“Saint Michel Tuant le Serpent”) ; pour lui “l’homme est limité par son avidité et sa négligence. Alors qu’il en a conscience, il ne fait pas toujours le bon choix pour améliorer son sort.” Il déclare que “si l’homme pouvait faire face à ses pulsions sombres, il pourrait les surmonter.” Une quête de rédemption qu’il illustre dans ses sculptures qu’il fabrique dans son studio du Kansas… situé dans une vieille église du 19ème siècle.

P.M.


 

Guillermo del Toro describes him as a “post-industrial Rococo master”. The pieces of the American artist Kris Kuski, partly made of salvage and model kit parts, tell as many stories as there are angles and details to observe. They plunge us in a morbid universe and would make proud any pirate having it on the stern of his ship. He uses references from gothic art  iconography but also from heavy metal culture resulting from his youth spent reproducing the Iron Maiden album covers which, at the time, for him the highest form of art. Kuski describes his work balance between chaos and symmetry and there is also a religious reading to his work (Saint Michael Killing the Serpent); for him, “the man is limited by his greed and negligence. Even if he knows it, he is not always making the right choices to improve his fate.” He said that “if man could embrace his dark impulses, he could overcome them.” A quest for redemption illustrated in his sculptures built in his studio based in Kansas… in an old 19th century church.

P.M.